Coq de combat d’Akio Tanaka et Izo Hashimoto

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Coq de combat (軍鶏Shamo) est un manga écrit par Izō Hashimoto et dessiné par Akio Tanaka.

En 2012, les Editions Delcourt ont réédité l’oeuvre pour une couverture plus percutante :

À 16 ans, le jeune lycéen doué a massacré ses propres parents. Placé en maison de correction, il va subir la violence et les humiliations de ses codétenus et des gardiens. Coups, mitard, agression sexuelle… La rencontre d’un étrange détenu politique, un certain Kenji Kurokawa, expert en karaté, va changer le cours de son existence et faire de lui un véritable coq de combat, prêt à tout pour ne pas se faire tuer. Une fois purgée sa peine, il sera tour à tour prostitué pour femmes, homme de main dans un gang puis sportif de haut niveau, évoluant en marge de la société japonaise occidentalisée et construisant son propre karaté au fil des rencontres.

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La violence des protagonistes de Shamo est directe et peut choquer : vols, viols, meurtres, torture, dopage aux stéroïdes, prostitution, toxicomanie… L’éditeur français a d’ailleurs choisi d’apposer la mention « pour public averti » sur la quatrième de couverture. Tout l’art d’Izō Hashimoto consiste à recadrer ces actes violents par petites touches dans un contexte social où la violence est bien plus globale et organisée. C’est celle de la société moderne : éducation-dressage, conditionnement à consommer/produire, émotions par procuration via la télévision, politique-spectacle, sport-spectacle, mort-spectacle… On découvre ainsi au fil des épisodes que Ryo est un gaucher contrarié. Mais aussi que la haine qu’il voue à son rival, le charismatique Naoto Sugawara (菅原直人), a été scénarisée à l’avance pour une chaîne de télévision ! Tout cela dans le seul but d’augmenter l’audimat et en flattant les instincts les plus bas du spectateur.

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Le citoyen-consommateur-spectateur repu de biens de consommation et de violence télévisuelle contraste avec l’humble paysan d’Okinawa du xviie siècle, qui inventa un art martial secret pour résister à l’occupant alors que les armes lui étaient interdites. Seulement aujourd’hui ce n’est plus la récolte de riz qui est dérobée par les féroces samouraïs du clan Satsuma, mais l’énergie, l’imagination, les rêves… L’essence même de la vie est confisquée pour se voir substituer une parodie tronquée : c’est l’ère du spectacle. Comme l’écrivait Guy Debord « Le spectacle est le moment où la marchandise est parvenue à l’occupation totale de la vie sociale. Non seulement le rapport à la marchandise est visible, mais on ne voit plus que lui : le monde que l’on voit est son monde. » La violence d’aujourd’hui est discrète, elle n’utilise plus le tranchant du katana mais de nouvelles armes appelées lobbyingmarketing et publicité.

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Ainsi, dans les nombreuses scènes de combats qui émaillent le récit, chaque action est l’occasion d’approfondir les caractères des protagonistes, d’évoquer la dimension spirituelle et sociale des arts martiaux, à travers de discrètes références au zen, au yoga ou encore à l’histoire politique du Japon. Même les dérives marchandes et spectaculaires des arts martiaux s’inspirent de l’actualité : ainsi le « lethal fight » n’est pas sans faire penser au K-1, ce sport de combat interdisciplinaire lancé par Kazuyoshi Ishii en 1993.

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(Source Wikipédia et Editions Delcourt)

 

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